Depuis un an, une nouvelle réglementation rebat les cartes de la gestion des déchets du bâtiment et des travaux publics sur notre territoire. Plongez dans les coulisses de cette petite révolution.  

 

Avec l’entrée en vigueur de la réglementation sur la Responsabilité élargie du producteur pour les produits et matériaux de construction du bâtiment (REP PMCB), les règles ont changé pour tous les acteurs du secteur. Les distributeurs de matériaux doivent désormais appliquer une éco-contribution sur chaque produit vendu. Quant aux professionnels du bâtiment, ils ne peuvent plus déposer leurs déchets dans les déchetteries publiques : ils doivent passer par des sites spécialisés. C’est pourquoi les communautés de communes du Val de Drôme en Biovallée et du Crestois et du Pays de Saillans ont adapté leurs règlements d’accès aux déchetteries. Mais pour que les artisans et entreprises ne se retrouvent pas sans solution, il fallait que des opérateurs privés ouvrent des points de collecte conformes à la REP PMCB.

 

Le groupe Liotard TP, pionnier du recyclage dans le BTP

En Drôme, le groupe Liotard TP fait figure d’avant-gardiste. Depuis des décennies, il recycle et réemploie des matériaux issus de ses propres chantiers, réduisant ainsi l’extraction de graviers dans les cours d’eau. Bien que le recyclage du béton soit coûteux et abîme les machines, Liotard a poursuivi cette démarche par conviction écologique plus que par intérêt économique.

Dans le nouveau contexte réglementaire, le groupe a choisi d’ouvrir sa plateforme de Crest à l’ensemble des professionnels. Avec le soutien de l’association Biovallée, une convention a été signée avec l’éco-organisme Valobat. Résultat : certains déchets triés (bois, plâtre, plastiques, menuiseries, bétons, enrobés, briques, terres cuites ou crues…) peuvent désormais y être déposés gratuitement.

“Nous avions quelques craintes sur les volumes et la qualité des déchets reçus, mais jusqu’ici tout se passe plutôt bien. La montée en charge est progressive. Cela ne rapporte pas grand-chose économiquement, mais la plateforme existait déjà : autant qu’elle profite aux pros qui veulent bien gérer leurs déchets.

Paul-Henri Martin, directeur général du groupe Liotard TP

 

Quand le recyclage rencontre le réemploi

Afin d’aller plus loin, l’association Biovallée a organisé une visite de la plateforme en présence de plusieurs acteurs locaux de l’économie circulaire : la bricothèque La Chignole, la manufacture de proximité Fab Unit, et la filière locale de recyclage des plastiques Paillettes. L’idée : explorer si certains matériaux collectés peuvent être réemployés plutôt que recyclés.

“Je pensais qu’il n’y aurait pas grand-chose d’intéressant à récupérer, mais nous sommes prêts à expérimenter, en confiance.”

Paul-Henri Martin, Liotard TP

De cette rencontre est née une collaboration concrète entre Liotard TP et La Chignole. Laurence Bayol, responsable de la matériauthèque de La Chignole, a pris contact avec l’agent de la plateforme Liotard pour aider à identifier les matériaux réutilisables. Des artisans sont encouragés à faire un saut à La Chignole pour les y déposer. En une semaine, 200 kg de matériaux ont ainsi été valorisés, principalement des vitrages et isolants. Une benne de La Chignole a également été installée sur le site de Liotard TP.

“Nous avons été agréablement surpris par la réactivité de Liotard. J’ai passé un coup de fil un lundi, et dès le mercredi, la benne était installée sur leur site. Nous irons la vider tous les quinze jours avec nos bénévoles.”

Laurence Bayol, valoriste à La Chignole

Même si cette démarche reste à ce jour informelle, elle s’inscrit pleinement dans les objectifs de la REP PMCB. L’éco-organisme Valobat rappelle que la filière vise 4 % de réemploi en 2027, alors que le taux actuel reste inférieur à 1 % selon l’Agence de la transition écologique (ADEME). Avec des coopérations locales comme celle entre Liotard TP et La Chignole, notre territoire pourrait bien prendre une longueur d’avance et dépasser ces objectifs.

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