Comment mieux rénover nos maisons individuelles ? Dans les années 2010, artisans, bureau d’étude et intercommunalités expérimentent ensemble une nouvelle manière de faire dans la vallée de la Drôme. Les chercheurs se sont penchés sur cette coordination marchande inédite et dévoilent l’intérêt d’ancrer la politique énergétique de l’habitat dans le territoire en associant acteurs techniques et politiques.

[Episode 1 de la série : Modes de vie dans la vallée de la Drôme vue par les chercheurs]

 

Expérimenter un groupement d’artisans pour rénover les maisons individuelles

En 2011, quelques élus et techniciens des intercommunalités rencontrent un bureau d’étude spécialisé en énergétique du bâtiment, dans le cadre du volet énergie du Grand Projet Rhône-Alpes GPRA Biovallée. Le bureau d’étude fait découvrir son approche de la rénovation : miser sur un travail global en remettant les artisans en première ligne afin d’être plus performant énergétiquement et financièrement. L’idée ? Regrouper des artisans de différents corps de métier, les former, et les faire travailler ensemble sur une rénovation globale d’une maison. Les élus y voient une opportunité pour diminuer la facture énergétique des ménages et améliorer les logements de la vallée.

De cette convergence d’intérêts nait l’expérimentation DORéMI : dispositif opérationnel de rénovation énergétique des maisons individuelles. Acteurs publics et privés (intercommunalité, bureau d’étude, institutions du bâtiments, artisans) s’engagent de concert et cinq chantiers pilotes démarrent en 2013.

 

Les intercommunalités, animateur territorial de la démarche

Les chercheurs ont étudié DORéMI uniquement durant sa phase d’expérimentation, c’est à dire entre 2011 et 2014. Leur analyse montre l’importance qu’à eu la coopération entre les acteurs publics et privés. Les  artisans ont joué un rôle majeur dans les chantiers pilotes en acceptant de se monter en groupement, alors même que ce type de coordination marchande était en décalage avec les pratiques classiques du métier.

Au début de l’expérimentation, il était prévu que les groupements d’artisans prennent aussi en charge les aspects financiers en accompagnant les particuliers dans leur démarche pour accéder aux aides de l’Etat. Cependant, ce système d’aide étant complexe et mouvant, il a été difficile à saisir. Les groupements se sont donc appuyés sur un conseiller en énergie en intercommunalité pour cela.

Cette action n’a pas été la seule portée par les intercommunalités durant l’expérimentation. Elles ont joué un rôle de véritable animateur territorial de la démarche, en mobilisant l’ensemble des acteurs, des artisans aux particuliers en passant par les partenaires. Auprès des particuliers, les intercommunalités ont également fait figure de tiers de confiance.

 

Enseignements généraux pour l’évolution de nos modes de vies

La coordination entre acteurs publics et privés semble incontournable : dans une rénovation énergétique globale d’une maison individuelle, les artisans ne peuvent porter complètement les dimensions financières et commerciales en plus des dimensions techniques. L’appui d’une collectivité en tant que tiers de confiance informant le particulier des choix dont il dispose a été un levier important durant l’expérimentation. Cela peut également constituer un facteur de pérennisation de la démarche.

Ne pas atteindre tous les objectifs d’une expérimentation est source d’innovation : ici l’enjeu était de confier aux groupements d’artisans les dimensions techniques mais aussi financières de la rénovation. La difficulté des artisans à se saisir du système d’aide français, a nécessité l’appui d’un technicien d’intercommunalité. Cette coordination entre acteurs, non prévue au début sur cette dimension financière, a pourtant créé un schéma relationnel entre acteurs pertinents, qui a ensuite été conservé dans l’essaimage du dispositif.

La dimension psychologique ne doit pas être oubliée : le manque de dialogue sur l’attachement des particuliers à leur habitat (esthétisme, usage, enjeu de transmission), peut conduire à une prise en compte tardive des souhaits et craintes des particuliers, conduisant parfois à l’annulation des projets.

 

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