De la production à la distribution en passant par la transformation, la chaîne de valeur de la filière des plantes à parfum aromatiques et médicinales (PPAM) fait intervenir de nombreuses entreprises. Ces dernières ont un rôle essentiel à jouer pour permettre l’adaptation de la filière au changement climatique. Approvisionnement durable et responsable, traçabilité, outils de mesure d’impact, commerce équitable,… de nombreuses initiatives ont été présentées lors du colloque des PPAM en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Tour d’horizon et principaux enseignements :
Une démarche RSE, oui mais pourquoi ?
Pierre-Philippe Gary, directeur général de la société familiale Bontoux qui emploie 100 personnes à Saint Auban sur l’Ouvèze au cœur des Baronnies provençales, nous a partagé avec une grande sincérité la trajectoire de son entreprise en matière de RSE. Selon lui, une PME familiale pérenne a généralement deux caractéristiques principales : une localisation comme point d’ancrage et une capacité à saisir les opportunités. C’est ainsi plus “par opportunisme que par conviction” que l’entreprise Bontoux est montée dans le bateau de la RSE, y voyant là une opportunité de se différencier de la concurrence.
Au début des années 2010, la RSE semblait être devenue incontournable pour ses clients qui se sont mis tour à tour à exiger des preuves en la matière. “Chacun avec son référentiel, un peu comme l’informatique des années 80”. Après 3 à 4 années de mise en œuvre, la stratégie RSE de Bontoux était devenue mature, et un constat de réalité s’imposait : la RSE n’était pas véritablement différenciante, » les clients nous bombardaient toujours de questionnaires, d’exigences, d’audits,… mais nous demandaient des prix toujours plus bas ». Que faire alors de cette déception, de cette opportunité manquée ? Revenir en arrière ? Pour l’entreprise Bontoux, le choix a été de recentrer la démarche RSE sur le point d’ancrage de l’entreprise : son territoire, ses salariés. “Aujourd’hui, on a oublié la composante clients dans notre démarche RSE” affirme, un brin provocateur, Pierre-Philippe Gary. “On a pris beaucoup de plaisir à mettre en œuvre notre démarche RSE. Ça nous a apporté du sens, et ça a donné de la lisibilité au projet d’entreprise. Aujourd’hui, on n’a pas de problème de recrutement”. Un témoignage qui fait écho aux réflexions menées dans le cadre de la communauté J’entreprends en Biovallée animé par l’association Biovallée, et notamment la démarche d’“entreprise à mission” qui implique un questionnement sur le sens que les entreprises souhaitent donner à leurs activités, et à leur démarche RSE.
Structurer et prioriser ses engagements RSE
Le champ de la RSE est large. Environnement, relations et conditions de travail, questions relatives aux consommateurs, loyauté des pratiques, développement local,… Comment les entreprises peuvent-elles prioriser leurs actions et s’assurer que celles-ci atteignent bien les objectifs fixés ? L’entreprise Elixens a fait le choix de prioriser la relation avec les producteurs, en adoptant un modèle de collaboration très avancée avec la SICA BIO PLANTES qui lui fournit 100% de sa production via un partenariat de long terme. Ce modèle protecteur pour les producteurs, sécurise aussi les sourcing d’ELIXENS France qui peut ensuite partager cette sécurisation des filières avec ses clients.
Pour l’entreprise Arcadie, la réponse a d’abord été de se fixer un cap ambitieux à moyen terme (10 ans) : “une entreprise citoyenne, des produits 100% équitables et locaux, un impact environnemental positif, le renforcement des liens locaux”. Puis identifier et travailler sur les enjeux prioritaires, comme le développement du commerce équitable dans des pays comme Madagascar où Arcadie se fournit en vanille, en poivre noir, ou encore cannelle. Pour cela, Arcadie a participé à la création du label Biopartenaire pour le commerce équitable qui a contribué à la définition d’une réglementation claire. Prochain défi : développer une activité éthique et bas carbone de transport maritime, via la création de la coopérative maritime windcoop.
Évaluer et communiquer en transparence
Mettre en place des actions en matière de RSE, c’est bien, mais évaluer leur impact et communiquer en transparence, c’est encore mieux. Dans cette optique, Kim Giraud-Bonne Crozet de la société La Drôme Laboratoire a présenté l’outil “Green impact index” développé par un consortium d’une vingtaine de sociétés dans le but de mesurer l’impact environnemental et sociétal des produits sur la base de critères précis dans plusieurs domaines (emballages, formule, fabrication, transport,…). Côté consommateur, cela se traduit par une “note d’impact socio-environnemental” (de A à E). D’après Kim Giraud-Bonne Crozet « les notes ont un impact sur les choix de nouveaux produits ou le relooking d’autres. L’outil est adapté à toutes les tailles d’entreprises et permet de capitaliser les efforts engagés par l’entreprise ».
L’entreprise Clarins a également présenté son outil de traçabilité dénommé TRUST CLARINS. Son objectif : transmettre aux consommatrices et des consommateurs des informations spécifiques sur l’ensemble de la chaîne de valeur menant à la réalisation d’un produit (unités de stockages, usines de production, dates de fabrication, ingrédients formule et origine des principaux ingrédients), la fiabilité des données étant sécurisée par une solution de “block chain”.
Si les initiatives présentées par les entreprises lors du colloque dédiées à la filière des PPAM ont certainement leurs limites et ont d’ailleurs été largement questionnées et débattues, le rôle de ces entreprises pour encourager la transition et l’adaptation de la filière aux défis du changement climatique ne fait aucun doute. Au-delà des solutions techniques innovantes, nous retiendrons l’authenticité des témoignages et la sincérité des démarches menées par des entreprises sur l’ensemble de la chaîne de valeur de la filière des PPAM.