Quel sens les entreprises donnent-elles à leurs activités ? Comment peuvent-elles embarquer leurs salariés et leurs parties prenantes autour d’une mission contribuant à la transition écologique ? Des questionnements qui ont animé la dernière rencontre entre dirigeants de notre communauté J’entreprends en Biovallée. L’occasion d’un retour d’expérience de GPA, devenue officiellement entreprise à mission en octobre dernier. 

 

Commencer par « pourquoi »

Dans une conférence TEDx devenue célèbre, intitulée « Commencer par Pourquoi ; Comment les grands leaders nous inspirent à passer à l’action », Simon Sinek, auteur et expert en marketing, proposait aux dirigeants d’organisation une méthode en apparence simple pour embarquer les personnes dans une aventure commune : plutôt que de décrire ce que leur organisation fait et comment elle le fait, il serait selon lui bien plus impactant d’exprimer d’abord pourquoi elle le fait. Et ce « pourquoi » ne peut en aucun cas avoir pour seule réponse « pour faire du profit » ou « pour gagner une élection », qui ne sont que des conséquences et n’ont au mieux qu’un pouvoir limité de motivation et d’inspiration. Ce « pourquoi » signifie plutôt, selon Simon Sinek : « dans quel but ? Quelle est votre cause ? Quelle est votre croyance ? Pourquoi votre organisation existe-t-elle ? Pourquoi est-ce que vous vous levez le matin ? Et pourquoi les autres devraient-ils s’y intéresser ? ». L’idée paraît séduisante, mais comment répondre à ces questions en évitant le greenwashing ? Comment s’assurer que les organisations agissent effectivement pour atteindre cette finalité, ce « pourquoi » ? C’est là que la notion de société à mission entre en jeu.

 

Avant toute chose, un peu de droit

Saviez-vous qu’entre 1804 et 2019, l’entreprise était uniquement définie dans le code civil comme devant « avoir un objet licite et être constituée dans l’intérêt commun de ses associés » ? Il faut attendre 2019, et le vote de la loi Pacte, pour que les enjeux de notre temps commencent à être intégrés dans notre conception légale de l’entreprise. Le code civil précise désormais que « la société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ». Cette même loi Pacte a également créé une nouvelle qualité juridique de « société à mission », qui permet aux entreprises d’inscrire dans leurs statuts une raison d’être – « principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité » – et de définir « un ou plusieurs objectifs sociaux et environnementaux que la société se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité ». Le législateur a ainsi souhaité encourager les entreprises à exprimer ce qu’elles ont de singulier et à intégrer à l’intérieur même de leur stratégie les enjeux sociétaux sur lesquels elles souhaitent s’engager.

 

GPA, première entreprise à mission en Biovallée !

La dernière rencontre entre dirigeants de notre communauté J’entreprends en Biovallée a été l’occasion d’un retour d’expérience d’Evelyne Barberot, co-directrice générale de GPA, devenue officiellement société à mission en octobre dernier : « Devenir entreprise à mission, c’est un long processus. On s’interroge sur le rôle de l’entreprise : quelle est sa contribution positive à la société ? Quelle est son utilité ? Définir sa raison d’être, ça n’est pas si simple », a-t-elle confié aux membres de notre communauté de dirigeants. Première étape essentielle, selon elle : structurer et formaliser sa politique RSE (responsabilité sociétale de l’entreprise) et constituer un comité RSE, composé pour partie de membres du comité de direction pour s’assurer que les enjeux RSE sont bien pris en compte dans la stratégie de l’entreprise. Ensuite, est venu le temps de la consultation de l’ensemble des parties prenantes, internes (salariés) et externes (clients, fournisseurs, partenaires) de l’entreprise pour définir la raison d’être et la mission de l’entreprise. Au total, 80 salariés – sur 250 – ont été associés à la réflexion. « Cela a bien fonctionné car les collaborateurs se sont sentis acteurs des changements à venir. Les échanges se sont déroulés dans une ambiance détendue. Je crois beaucoup au collectif. Ça crée du lien et ce qui nourrit le lien, c’est le sens. Et le sens génère l’engagement », nous a confié Evelyne Barberot. La mission que GPA s’est donnée : « recycler les mobilités en un futur désirable et solidaire ». Une belle mission, et un processus transformateur, confrontant et engageant, loin de la chasse aux labels.

 

Un processus au long cours

Mais la démarche de « GPA entreprise à mission » ne s’arrête pas là. « Maintenant, on doit décliner nos objectifs statutaires en objectifs opérationnels », poursuit Evelyne Barberot. « C’est un travail collectif, très engageant. C’est à partir de là que commence la vraie transformation de l’entreprise ». En effet, si une simple déclaration de la qualité de société à mission au registre du commerce suffit au démarrage de la démarche, la loi Pacte a prévu des éléments permettant de suivre en continu et d’évaluer cette démarche : mise en place d’un comité de mission pouvant intégrer des représentants de parties prenantes externes, publication chaque année d’un rapport de mission, et vérification tous les deux ans par un organisme tiers indépendant de l’adéquation entre la mission que s’est fixée l’entreprise, les actions mises en place et les moyens alloués.

 

 « Plus on sera nombreux, plus la vague sera forte »

L’exemple de GPA nous montre que le processus menant vers la qualité d’entreprise à mission induit en lui-même des effets bénéfiques en termes de cohésion interne et de réflexion stratégique pour l’entreprise. Mais les conséquences positives vont bien au-delà. « Cela permet d’inscrire les valeurs familiales dans les statuts de l’entreprise, et de s’assurer que ces valeurs se transmettent d’une génération à l’autre, dans un contexte de développement rapide », nous a expliqué Evelyne Barberot. Les considérations économiques ne sont également pas oubliées, loin de là. « On le fait aussi pour la pérennité de l’entreprise. La transformation, ça crée de l’émulation, de l’innovation. Nous souhaitons démontrer qu’il est possible de concilier industrie, croissance et respect de l’environnement ». Devenir entreprise à mission est en outre un gage d’employabilité et d’attractivité pour des candidats sensibles au sens de la mission à laquelle ils vont contribuer et à l’authenticité des engagements pris par l’entreprise qu’ils rejoignent. Ainsi, GPA n’a aujourd’hui aucune difficulté de recrutement.

Meilleurs vœux de réussite à GPA dans la réalisation de sa nouvelle mission, en espérant que d’autres suivront rapidement, car comme nous l’a bien dit Evelyne Barberot, « plus on sera nombreux, plus la vague sera forte ».

Share This