Agnès Ducharne, directrice de recherche au CNRS, hydrologue et spécialiste du cycle de l’eau, Philippe Lagrange, vice-président de l’association Biovallée, Samuel Bonvoisin, conférencier, consultant et formateur en conception de systèmes régénératifs et Marc-Antoine Forconi, agriculteur permacole, référent écosystème et paysages régénératifs de l’Ecole pratique de la nature et des savoirs, lors de la table ronde organisée par l’association Biovallée dans le cadre du festival « Les yeux dans l’eau ».

Nous explorons, à l’association Biovallée, des solutions pour répondre à la problématique de l’eau sur le territoire. C’est ce qui a encouragé les organisatrices du festival Les yeux dans l’eau à nous proposer une place dans la programmation. Le sujet de la ressource en eau en Biovallée est complexe, les solutions à l’essai sont multiples et nous dialoguons régulièrement avec les acteurs qui les portent. Afin de mener à bien notre mission de transmission de savoirs utiles à la transition, nous avons invité une partie d’entre eux à se joindre à nous à l’occasion d’une table ronde, pour partager avec le public, nos retours d’expérience. Un moment très riche, qui nous l’espérons, aura été source d’inspiration.

Ecoutez l’intégralité des échanges :

Le constat

Les cycles de l’eau sont perturbés par les activités humaines. Le réchauffement climatique accentue l’intensité des phénomènes, sécheresses et épisodes pluvieux, et l’artificialisation des sols (habitats, infrastructures…) comme plus généralement nos pratiques d’aménagement de l’espace rendent le paysage moins capable de s’adapter à ce dérèglement. C’est tout l’écosystème qui est impacté : les milieux aquatiques, le monde agricole, les citoyens et l’accès à l’eau potable, les industries, la production d’énergie…

La sobriété est le premier réflexe à adopter. Sobriété dans les usages de l’eau, directs ou indirects, à savoir l’eau invisible qui a servi à la fabrication des produits que nous consommons. Mais sobriété également dans nos modes de vie plus généralement et notre façon de consommer.

On peut certes améliorer le potentiel hydrique d’un territoire mais le principal facteur de changement des précipitations locales, reste le changement climatique. Il faut donc réduire nos émissions de gaz à effet de serre, nos consommations en eau, mais également notre consommation tout court.

Agnès Ducharne, directrice de recherche au CNRS, hydrologue et spécialiste du cycle de l’eau

 

Cependant, tous les intervenants sont unanimes, il est incontournable de penser des solutions complémentaires pour gérer la ressource en eau.

Si à court terme, l’urgence nous engage à explorer des solutions d’adaptation, le long terme nous invite à l’optimisme en explorant des solutions de régénération.

 

L’aventure vous inspire ? Vous souhaitez être acteur ou actrice des solutions liées à la restauration des cycles de l’eau et à sa gestion, voici des ressources et informations qui complèteront l’écoute de la table ronde, pour vous aider à passer à l’action.

 

S’adapter à court terme

  • La réutilisation des eaux usées traitées

C’est un projet que nous portons à l’association Biovallée pour répondre à l’urgence des besoins en eau de l’agriculture sur le territoire, pour éviter les pratiques extractives et les atteintes au milieu. Le projet, aussi appelé économie circulaire de l’eau, prévoit de stocker les eaux usées traitées (et contrôlées) dans des ouvrages en aval des stations d’épuration, quand le débit de la rivière le permet, et de mettre cette eau à disposition des agriculteurs en période d’étiage (quand le niveau de la rivière est bas en été et au-delà). C’est le même principe que la cuve à eau alimentée par la gouttière dans votre jardin. Les eaux usées traitées ont par ailleurs l’avantage de contenir une certaine teneur en potassium, phosphore et azote, nutriments fondamentaux pour les cultures.

Ce projet n’aura pas de sens si les parcelles irriguées n’infiltrent pas l’eau. Il sera question d’adapter les pratiques culturales (culture sur sol vivant, etc.), de choisir des cultures plus économes en eau, de resserrer les parcelles…

Philippe Lagrange, vice-président de l’association Biovallée

Pour aller plus loin :

Une étude sur la réutilisation des eaux usées traitées en Biovallée

Économie circulaire de l’eau : le territoire attend le coup d’envoi de l’État

Réutilisation des eaux usées traités : visite du site de Luc-en-Diois

 

Régénérer à moyen et long terme

  • L’hydrologie régénérative

Portée sur le territoire par un nombre grandissant d’acteurs, vous entendez Samuel Bonvoisin et Marc-Antoine Forconi parler de l’hydrologie régénérative. Une discipline qui tend à rendre au paysage ses aptitudes à stocker l’eau.

Les principes de l’hydrologie régénérative répondent à quatre verbes d’action : ralentir, répartir, infiltrer et stocker. Il n’y rien de plus efficace que le paysage lui-même pour stocker l’eau.

Samuel Bonvoisin, conférencier, consultant et formateur en conception de systèmes régénératifs

Sur notre sous-bassin versant, l’eau ne nous servait qu’une fois avant de filer dans les cours d’eau. Grâce à l’hydrologie régénérative, elle est utilisée désormais quatre fois et profite non seulement aux habitants, mais aux cultures et à nos animaux.

Marc-Antoine Forconi, agriculteur permacole au GAEC de Montlahuc, référent écosystème et paysages régénératifs de l’Ecole pratique de la nature et des savoirs

Pour aller plus loin :

L’hydrologie régénérative ou transformer les paysages

 

  • Cohabiter avec le castor

Il est l’objet de toutes les attentions dans certains cercles sur le territoire. Le castor, redouté par les agriculteurs quand il s’aventure dans leurs parcelles ou transforme le cours des rivières avec ses ouvrages, a les qualités de ses défauts. Il permet de réguler le débit de l’eau et de réhabiliter des cours secondaires asséchés, répartissant l’eau plus largement et permettant son infiltration et le stockage dans les nappes phréatiques. Heureusement, les agriculteurs peuvent toucher des indemnités pour les parcelles touchées. Un signe que le castor est une partie de la solution. Une dynamique est en cours sur le territoire pour imiter les ouvrages de castor là où il n’intervient pas ou plus… en espérant son retour.

Les castors ont inondé deux hectares sur une parcelle qui en faisait six. On a perdu de la surface, mais la végétation s’est transformée, s’est remplie de légumineuses. Nos troupeaux y paissent désormais quatre fois par an contre une seule avant l’intervention du castor.

Marc-Antoine Forconi, agriculteur permacole au GAEC de Montlahuc, référent écosystème et paysages régénératifs de l’Ecole pratique de la nature et des savoirs

Pour aller plus loin :

 

Notre association accueillera bientôt un chargé de mission eau, sols, biodiversité pour consolider les actions entreprises, accompagner nos ambitions sur les thématiques et être à l’interface de tous les acteurs qui s’engagent pour des projets de régénération écologique sur le territoire. N’hésitez pas à nous solliciter !

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